Nov 2015: la durée d'antibiothérapie dans les infections intra-abdominales
LES ATB DANS LES INFECTIONS INTRABDOMINALES: ENCORE UN EFFORT !
Etude STOP IT :Trial of short course antimicrobial therapy for intraabdominal infection. N Eng J Med. 21 mai 2015Référence : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25992746
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Introduction
Les infections intra abdominales sont des affections fréquentes dont la morbidité est de l'ordre de 5 à 30 %. La prise en charge de ces infections comporte une antibiothérapie et surtout un geste chirurgical ou radiologique permettant le contrôle local du foyer infectieux. Bien que les recommandations internationales soient bien codifiées quant à la nature et la durée courte (4 - 7 jours) de l'antibiothérapie, les études observationnelles montrent que la durée moyenne d'antibiothérapie sont plus longues (10-14 jours).
Objectif de l'étude :
Comparaison d'une durée d'antibiothérapie fixe de 4 jours en post opératoire à un traitement antibiotique traditionnel inférieur ou égal à 10 jours.
Méthodes
Essai prospectif randomisé contrôlé d'équivalence multicentrique ouvert en intention de traiter. (USA/Canada)
Population étudiée : Patients porteur d'une infection intra-abdominale ayant bénéficié d'une chirurgie ou d'un drainage radiologique permettant un contrôle adéquat de la source de l'infection. (Critères d'exclusion non précisés)
L'hypothèse de départ prévoyait 30% de taux de complication dans le groupe contrôle et acceptait une différence de +/- 10% dans le groupe expérimental.
Randomisation entre 2 durées de traitement :
- Groupe contrôle : arrêt des ATB à J+2 de la régression du SIRS (selon la définition usuelle) associée à une reprise alimentaire satisfaisante (>50% des apports caloriques nécessaires). Durée maximum de 10 jours
- Groupe expérimental : durée fixe d'ATB de 4 jours +/- 1 post opératoire
L'hypothèse de départ prévoyait 30% de taux de
complication dans le groupe contrôle et acceptait une différence de +/-
10% dans le groupe expérimental.
Résultats
518 patients inclus contre 1010 attendus d'après le calcul d'effectif. Etude interrompue après une analyse intermédiaire pour futilité.
Les caractéristiques de la population sont des patients peu graves (Apache moyen à 10), communautaires pour environ 2/3 d'entre eux. Les sites infectés sont divers avec des abcès plus ou moins profonds, des péritonites et des appendicites. Il y a environ 30% de chirurgies digestives lourdes. L'équivalence est atteinte en ce qui concerne le critère de jugement principal composite comprenant la recherche du nombre d'infections du site opératoire, nombre de récidive d'infection intra abdominale, décès (56/257 soit 21,8% dans le groupe expérimental et 58/260 soit 22,3% dans le groupe contrôle).
Concernant les critères de jugement secondaires, les complications locales étaient diagnostiquées plus précocement dans le groupe expérimental par rapport au groupe contrôle. La déviation au protocole concernait 20 et 30% des patients mais n'était pas statistiquement différente entre les 2 groupes dans l'analyse per protocole.
L'analyse des différents sous- groupes (exclusion des appendicites, stratification sur le score Apache, infection nosocomiale) ne permet pas non plus de mettre en évidence de différence en ce qui concerne le critère de jugement principal.
Discussion
Sur le plan méthodologique certains aspects sont discutables : étude de non infériorité dont l'analyse de référence devrait être l'analyse per protocole et non l'analyse en intention de traiter.
L'hypothèse de départ est peu cohérente avec l'analyse de la littérature, à savoir taux de complications évoquées en introduction situés autour de 20 % et non 30% +/- 10 %. D'ailleurs, il n'est pas précisé par l'hypothèse de départ lequel des paramètres du critère de jugement principal composite permet de déterminer le taux de 30%.
Concernant la population de l'étude, il est clair que ces malades sont peu sévères et que le terme infection intra abdominale reste très large et imprécis, comprenant des infections localisées drainées qui pourraient presque même faire discuter un geste seul sans antibiothérapie et a contrario, des péritonites dont la qualité du contrôle chirurgical est un élément tout aussi important pouvant être un élément conditionnant la prolongation de l'antibiothérapie . Compte tenu du schéma expérimental choisi de 4 jours, il parait également illogique de n'avoir pas exclu les appendicites dont l'antibiothérapie ne devrait pas excéder 48h selon les recommandations.
Tous ces éléments participent à favoriser le groupe expérimental et rendent difficile l'extrapolation du résultat principal de l'étude.
On peut également s'étonner du type d'antibiothérapies probabilistes choisies qui sont à large spectre d'emblée alors que la population communautaire est fréquente ainsi que de l'absence de donnée concernant les potentielles désescalades.
Conclusion
Chez les patients peu graves porteur d'une infection intra abdominale d'étiologie diverse localisée ou généralisée, une antibiothérapie courte semble licite à condition d'avoir pu réaliser un geste chirurgical optimal sans délai.
Cette stratégie comporterait comme intérêt principal de permettre un diagnostic plus précoce des complications locales et infectieuses secondaires.
Ceci conforte les recommandations françaises de la SFAR sur la prise en charge des infections intra abdominales à savoir 2 à 3 jours pour les infections intra abdominales localisées et 5 à 7 jours pour les infections intra abdominales dites généralisées. (http://sfar.org/wp-content/uploads/2015/09/2_AFAR_Prise-en-charge-des-infections-intra-abdominales.pdf)