Juin 2016: le remplissage dans le choc

AU ROYAUME DES AVEUGLES


Fluid challenges in intensive care: the FENICE study: A global inception cohort study.

Cecconi M ; FENICE Investigators; ESICM Trial Group. Intensive Care Med. 2015 Sep;41(9):1529-37
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Introduction

De nombreux éléments restent encore sujets à débat dans le domaine du remplissage vasculaire : nature et volume du soluté, quand le débuter et comment juger de son efficacité. La simple évaluation clinique est insuffisante et de nombreux indices et techniques sont à la disposition du clinicien. L'objectif de ce travail est une photographie internationale des pratiques de remplissage en réanimation.

Méthodes

Etude observationnelle prospective transversale (46 pays). Chaque centre incluait au maximum 20 patients sur une durée de 1 semaine (juillet 2013). Les critères d'inclusion étaient des patients > 18 ans qui bénéficiaient d'une épreuve de remplissage au cours de la semaine, idéalement le premier remplissage. Le principal recueil concernait la façon dont le clinicien posait l'indication d'un remplissage vasculaire. Il était également recueilli le type et le volume de soluté administré, les variables utilisées pour indiquer le remplissage, son efficacité et sa sécurité.

Résultats

2213 patients ont été inclus. Le remplissage médian était de 500ml [500-1000] sur une durée médiane de 24 min [40-60min]. Les cristalloïdes étaient les solutés les plus utilisés (74%) (pour moitié solutés balancés et pour moitié sérum salé isotonique). Pour 1211 patients (59%), l'hypotension artérielle était la principale indication. Pour 785 patients (35%), des indicateurs statiques étaient choisis, en particulier la PVC (9/10) Les indices dynamiques n'étaient utilisés que pour 483 patients (22%) dont le lever de jambes passif pour moitié. La réponse au remplissage était évaluée chez 1544 patients (69% : pour 2/3 par l'augmentation de la PAM). La réponse ou non au remplissage n'était pas un critère pour la poursuite de celui-ci.

Discussion

 Ces données semblent mettre en évidence une grande hétérogénéité des pratiques ainsi qu'une utilisation très modeste des outils de monitorage hémodynamique en réanimation contrairement aux recommandations. Notamment très peu d'échographie cardiaque (4%) ont été pratiquées. Cependant, cette étude s'est intéressée principalement au 1er remplissage des malades en réanimation, phase initiale de prise charge à laquelle le remplissage est préconisé en l'absence de monitorage hémodynamique. Il aurait été intéressant de préciser le délai d'admission en réanimation, ainsi que le volume de remplissage préalable à l'entrée en réanimation. On peut également constater que les indices dynamiques sont peu utilisés, alors qu'ils sont les seuls pertinents dans l'évaluation de la précharge dépendance en réanimation.

Conclusion

Alors que selon les recommandations, le premier remplissage ne nécessite pas de monitorage sauf cas très particulier, un monitoring hémodynamique est souhaitable par la suite. Or, cette étude montre que les pratiques sont arbitraires malgré les effets délétères démontrés de l'insuffisance ou de l'excès de remplissage sur la morbi-mortalité. On peut supposer que la multitude des indices, des dispositifs disponibles, ainsi que leurs nombreuses limites, mettent en difficulté le clinicien dans leur utilisation pour indiquer une thérapeutique pluriquotidienne. Nous sommes donc tous borgnes

Expert 

Dr Biais (Réanimation neurochirurgicale GH Pellegrin)

Présents

Pr Gruson, Drs Boyer, Pillet, Bui, Clouzeau, Romen, Sazio (Médecine Intensive Réanimation GH Pellegrin) Dr Mourissoux (Médecine Intensive Réanimation HSA) Drs Stecken, Moisan (Déchoquage GH Pellegrin), Dr Berdaï (Pharmacologie, GH Pellegrin)