FEV 2021 basse PEP pour ventiler les patients en dehors du SDRA ?
La ventilation des non SDRA: pas besoin de se mettre la pression !
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Effect of a Lower vs Higher Positive End-Expiratory Pressure Strategy on Ventilator-Free Days in ICU Patients without ARDS. A Randomized Clinical Trial.
JAMA. 2020;324(24):2509-2520. doi:10.1001/jama.2020.23517
Introduction
Il existe une incertitude dans la littérature concernant les
bénéfices d'une ventilation mécanique avec une PEP élevée chez les patients de
réanimation ne présentant pas de SDRA.
La tendance internationale est d'utiliser des valeurs de PEP aux
alentours de 7-8 cmH2O chez les patients de réanimations sous
ventilation mécanique. Une ventilation avec haute PEP si elle est supposée
diminuer le risque d'hétérogénéité des zonées aérées, pourrait aussi avoir des
conséquences pulmonaires et hémodynamiques. L'objectif de l'étude est de déterminer
si une stratégie de PEP basse n'est pas inférieure à une stratégie PEP élevée
concernant le nombre de jours sans ventilation mécanique au 28ème jour de
l'intubation.
Méthode
Etaient inclus les patients sous ventilation mécanique invasive pour une durée prévue > 24h. Le critère d'exclusion principal était le SDRA. Il s'agissait d'un essai clinique randomisé contrôlé de non infériorité en simple aveugle, mené d'octobre 2017 à décembre 2019 dans 8 réanimations aux Pays-Bas. Les participants ont été randomisés 1/1 pour recevoir une ventilation invasive en utilisant soit une PEP basse, consistant à trouver le niveau de PEP le plus bas entre 0 et 5 cm H2O, soit une PEP élevée, consistant en un niveau de PEP de 8 cm H2O. Pour la PEP basse les objectifs de FiO2 étaient entre 21 et 60% afin d'obtenir une SaO2>92% et une PaO2>60mmHG, de plus des niveaux d'hypoxémie plus bas étaient tolérés pour une durée inférieurs à 5 minutes. Le critère de jugement principal était le nombre de jours sans ventilation mécanique à J28. Les critères de jugement secondaires comprenaient les durées de séjour réanimation et hôpital, la mortalité à 28 et 90 jours, le développement d'un SDRA, pneumonie, pneumothorax, atélectasie sévère, hypoxémie sévère ou nécessité de traitements de secours pour l'hypoxémie et les jours avec utilisation de vasopresseurs ou sédation.Le
calcul du nombre de sujets nécessaire, établi à 980 patients, se basait sur une
puissance de 80%, un risque alpha de 5%, une marge de non-infériorité de -10% du
CJP (ou un IC95% du RR devant rester > 0.9) accordée au groupe basse peep
par rapport au groupe haute peep (correspondant à 12h de ventilation mécaniques
supplémentaires chez les patients du groupe PEP basse), des données perdus
estimées à 10%. L'analyse principale des données était
en ITT.
Résultats
970 patients ont été inclus dans l'analyse. Il n'y
avait pas de différence à baseline avec un rapport P/F à 210 en moyenne. Le niveau
de PEP obtenu dans le groupe basse vs haute peep était respectivement de 5 et 7
cmH2O sans conséquence sur les différentes prises en charge en dehors d'un
besoin de remplissage de 500ml de plus dans le groupe haute PEP. A J28, 476
patients du groupe PEP basse avaient une médiane de 17.7 jours sans ventilation
mécanique (IQR 0-27) contre 493 patients ayant une médiane de 16.7 jours (IQR,
0- 27 jours) dans le groupe haute PEP (RR 1,04; IC à 95%, 0,95- ∞ ; P =
0,007 pour la non-infériorité). La survenue d'hypoxémie sévère était de 20,6%
vs 17,6% (risque relatif, 1,17; IC à 95%, 0,90-1,51; p = 0,99) et la nécessité
d'une stratégie de sauvetage était de 19,7% vs 14,6% (risque relatif, 1,35; IC
à 95%, 1,02-1,79; P ajusté = 0,54) chez les patients PEP basse et élevée,
respectivement. La mortalité à 28 jours était de 38,4% vs 42,0% (rapport de
risque, 0,89; IC à 95%, 0,73-1,09; P = 0,9) chez les patients PEP basse et
élevée, respectivement. Les résultats ont été confirmés en analyse
per-protocole
Discussion
La stratégie basse PEP est donc non inférieure à la stratégie haute PEP. Les auteurs concluent - sans le justifier - qu'il faut donc préférer les basses PEP. Ceci est discuté par les membres présents.
En effet, si dans une étude de non infériorité, la stratégie qui est non inférieure doit au moins apporter un avantage en termes de simplification des soins ou de cout, ici, la stratégie basse PEP a entrainé plus d'épisodes d'hypoxémie nécessitant une action des soignants afin d'éviter qu'elle ne devienne sévère comme le montre la figure 2 et est donc moins simple.
En dehors d'un remplissage de 500 ml de moins dans le groupe basse vs haute PEP, les patients ne sont pas sevrés plus vite et n'ont pas de devenir différent sur le plan respiratoire. On peut donc tout aussi bien conclure qu'il faut garder une stratégie haute PEP.
Les experts tranchent le débat en rappelant qu'il faut de toute manière un minimum d'individualisation de la ventilation. Par exemple, alors qu'ils ont été écartés de l'étude, les patients ayant une compliance thoraco-pulmonaire basse (obèses, pression intra abdominale un peu élevée, ascite, colectasie etc) sont à risque d'atélectasie et donc d'hypoxémie liée à un dérecrutement des territoires pulmonaires dépendants (déclives). Une stratégie haute PEP a contrario nécessite d'avoir un remplissage plus optimal et pourrait être problématique en cas d'hypovolémie ou d'insuffisance cardiaque droite. Enfin, une stratégie amenant les patients à des saturations assez basses (93%), qui peut être une conséquence des basses PEP, doit s'acquitter d'un taux d'hémoglobine satisfaisant (>8g/dl) afin de garantir une concentration artérielle en oxygène suffisante, information que nous n'avons pas.
En ce qui concerne le protocole de sevrage respiratoire dans cette étude, le groupe haute PEP devait passer de 8 à 0 cmH2O d'un seul coup, cette marche peut chez certains malades être trop élevée (insuffisance cardiaque gauche) et dans ce cas un niveau transitoire intermédiaire (basse PEP) serait probablement bénéfique.
Conclusion
Au total, les deux stratégies sont équivalentes sur les critères choisis du moment qu'un minimum d'individualisation est apportée en fonction des comorbidités.
Présents
Drs Bui, Clouzeau, Champion, Sazio, Khan, Godard, Youssef, Sioniac et Prs
Boyer, Gruson (Médecine Intensive Réanimation, GH Pellegrin),
Dr Hanisch (Réanimation, CH Mont-de-Marsan), Drs Grenouillet, Fayolle (Unité de Surveillance Continue, CH
Arcachon), Dr Picard (Réanimation, Pau)
Expert
Dr Rozé (Réanimation GH Sud)