Avril 2017: méta-analyse entre amis

Continuous versus Intermittent β-Lactam Infusion in Severe Sepsis A Meta-analysis of Individual Patients Data from Randomized Trials

Jason A. Roberts, Mohd-Hafiz Abdul-Aziz, Joshua S. Davis, Joel M. Dulhunty, Menino O. Cotta, John Myburgh, Rinaldo Bellomo, and Jeffrey Lipman
Am J Respir Crit Care Med Mars 2016
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed?term=(Roberts%20JA%5BAuthor%20-%20First%5D)%20AND%20(%22American%20journal%20of%20respiratory%20and%20critical%20care%20medicine%22%5BJournal%5D)
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Introduction

Les β-lactamines (BL), antibiotiques (ATB) temps-dépendant, pourraient bénéficier d'une administration continue vs intermittente. L'objectif de cette méta-analyse est de comparer le taux de mortalité de BL selon les deux modes d'administration chez les patients en sepsis sévère ou en choc septique.

Méthodes

Les études ont été sélectionnées après revue de la littérature sur Pubmed jusqu'à novembre 2015. Etaient retenus les essais randomisés contrôlés comparant en intention de traiter l'administration continue (au moins 24h) vs intermittente (perfusion ≤ 30min) de BL, à dose identique, chez des patients en sepsis sévère ou en choc septique. Le risque de biais était recherché pour chaque étude grâce à l'outil de collaboration Cochrane. Deux évaluateurs indépendants analysaient chaque étude. Le critère de jugement principal était la mortalité hospitalière à J30. Le critère secondaire était la guérison clinique définie par la disparition des signes cliniques infectieux entre 7 et 14 jours après la fin du traitement ATB. L'analyse statistique se basait sur les données patient individuelles. La survie était évaluée grâce à une courbe de Kaplan Meier et la comparaison des 2 groupes de traitement était réalisée grâce à un test de Log Rank.

Résultats

Des 46 études initialement identifiées, seules 3 ont été retenues incluant 632 patients (312 dans le groupe « continu » et 320 dans le groupe « intermittent »). Il n'y avait pas d'hétérogénéité entre les 3 études (i² = 0 %). Les caractéristiques des patients étaient similaires dans les 2 groupes. L'ATB le plus utilisé était piperacilline-tazo et le site infectieux pulmonaire était le plus fréquent. Il y avait une documentation bactériologique dans 31.1 % (intermittent) et 35.6 % des cas (continu). Le traitement randomisé était administré pendant une médiane de 4 j (intermittent) vs 5 j (continu). La mortalité hospitalière était significativement plus basse (RR 0.74 ; 95% CI, 0.56-1.00 ; p=0.045) et le taux de guérison clinique plus important (RR 1.2; 95% CI, 1.03-1.40 ; p=0.021) dans le groupe continu vs intermittent.

Discussion

La première critique concerne la sélection des études. La recherche bibliographique s'est cantonnée à la base de recherche pubmed et les 3 études finalement retenues sont issues de la même équipe de recherche. Ce problème explique l'absence totale d'hétérogénéité (i2 0%). Selon les experts, si une méta analyse avec une trop grande hétérogénéité (i² > 20%) peut être difficile à interpréter, une méta-analyse trop homogène a également des limites. Notamment, elle ne va pas permettre de générer de nouvelles hypothèses, ce qui aurait permis de déterminer dans quel sous-groupe le traitement était le plus pertinent.

Seconde critique, chacune des trois études prise séparément montrait un effet faible et non significatif de l'administration continue. La méta-analyse en poolant les données rend cet effet significatif grâce à un gain de puissance. Mais l'effet ne devient pas pour autant plus pertinent ou important cliniquement. Autrement dit, n'importe quelle étude incluant un nombre très important de patient finira par trouver un effet significatif sur le plan statistique mais pas forcément pertinent sur le plan clinique. C'est aussi au respect de la pertinence clinique que sert le calcul d'effectif, qui n'a pas lieu quand on fait une méta-analyse.

Deux autres critiques peuvent être faites. Sur le plan clinique, la pertinence du critère de jugement mortalité à J30 est critiquable. L'analyse de la guérison clinique aurait semblé un critère de choix plus pertinent d'autant que la durée de l'antibiothérapie est courte. Sur le plan pharmacocinétique, le groupe intermittent bénéficie d'une perfusion de 30 min au lieu d'une perfusion prolongée (sur 2 à 4 heures ce qui est différent d'une administration continue), ce qui ne correspond pas aux pratiques moderne d'administration des BL.

Conclusion

Les auteurs concluent à une supériorité de l'administration continue sur la mortalité à J30 chez les patients en choc septique et sepsis sévère. Les limites méthodologiques propres aux méta-analyses soulevées par les experts et la question de la pertinence de l'effet ne nous permettent pas d'adhérer à ce qu'ont écrit les auteurs de la Surviving Sepsis Campaign 2016: "a recent individual patient meta-analysis [] demonstrated an independent protective effect of continuous therapy" 

Experts

Pr Salmi , Dr Saillour (ISPED) , Dr Boucher (Pharmacologie, GH Pellegrin)

presents

Pr Gruson , Pr Boyer , Dr Bui , Dr Clouzeau , Dr Sazio , Dr De Guillebon , Dr Champion , Dr Laterrade (Medecine intensive reanimation, gh pellegrin), Dr Griton (Réanimation neurochirurgicale gh pellegrin),  Dr Carrié (Réanimation chirurgicale, GH pellegrin)