un salon de l hotel st marc a new york
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UN SALON DE L'HOTEL SAINT MARC A NEW YORK ?
De 1861 à 1974, il fut le siège de la Direction Générale des Hospices Civils comme on disait alors. A cette époque, M. Pautrat, directeur général, décida en accord avec le Conseil d'Administration du CHU de transférer l'administration dans des locaux plus fonctionnels et mieux adaptés au développement du CHU.
Des bâtiments furent construits spécialement à cet effet à Talence au milieu des vignes sur le vaste domaine de la « Maison maternelle de Cholet ». Néanmoins, il fut décidé de conserver l'Hôtel de Saint-Marc légalement toujours « siège social » de la direction générale et de le restaurer.
Classé monument historique, répertorié ces dernières années dans l'Inventaire Malraux, l'Hôtel de Saint-Marc reste un des fleurons du patrimoine monumental bordelais, malgré de nombreux remaniements nécessités par sa reconversion en bureaux pendant plus d'un siècle. Il est peu connu des bordelais, car il ne s'ouvre que pour des manifestations de prestige du CHU ou à l'occasion des Journées du Patrimoine.
![]() ©Jean-Luc Pettes Association Amis du Patrimoine Hôtel De Saint-Marc | Ceux qui l'ont visité savent qu'il a conservé, en dépit des aléas de son existence, une grande partie du décor
initial choisi par ses deux premiers propriétaires Joseph Dufour,
conseiller du Roi et Jean-Paul André Razins de Saint-Marc, militaire,
poète et ami des artistes. Le premier le fit construire de 1782 à 1784
par un architecte bordelais resté inconnu, le second, après l'avoir
acquis en 1784, le fit réaménager par les collaborateurs de l'architecte
Victor Louis dont il était l'ami. Il en subsiste de très beaux salons
décoré de superbes boiseries qui mettent en valeur les meubles anciens
et les objets d'art qui y ont été rassemblés.
L'hôtel garde sa part de mystère. D'abord on n'en connaît pas l'architecte, sans doute un des meilleurs de la brillante école bordelaise de cette époque. Ensuite, le visiteur qui découvre cette demeure ne peut manquer d'avoir l'attention attirée par une particularité d'un des salons. |
La solution de cette petite énigme se trouve peut-être à New-York. Il y a une vingtaine d'années, un membre de l'Association des Amis du Patrimoine du CHU était allé visiter, sur la 5e Avenue, le célèbre Metropolitain Museum, l'équivalent de notre Louvre. Après avoir parcouru les prestigieuses galeries de peintures, il eut l'idée de s'attarder dans la partie du musée moins fréquentée consacrée aux Arts décoratifs. Tandis qu'il arpentait, épuisé, une enfilade de salons dorés échappés à la destruction de grands Hôtels particuliers parisiens, il eut soudain l'attention attirée par un panneau indicatif qui orientait le visiteur vers une «Bordeaux room». Quel ne fut pas son étonnement, lorsque ayant suivi le cheminement indiqué, il se trouva tout à coup, en présence du salon ovale de l'Hôtel de Saint-Marc! Il avait en effet, sous ses yeux incrédules, un petit salon aux boiseries gris perle, fort agréablement meublé et décoré, dont l'harmonie évoquait pour lui, irrésistiblement, le décor de l'Hôtel du cours d'Albret.
A proprement parler, il lui faut avouer que les proportions du salon du «Met» ne lui semblaient pas tout à fait les mêmes que celles de son jumeau bordelais. Mais l'impression du visiteur fût bien, à ce moment précis, celle du héros du fameux roman d'Arsène Lupin « la demeure mystérieuse », lorsque ce dernier se retrouve au fond d'une sordide banlieue, dans le salon de l'hôtel particulier qu'il a quitté quelques heures auparavant dans un quartier résidentiel du centre de Paris. Détail supplémentaire : un cartel disposé à l'entrée de la pièce confirmait bien que les boiseries exposées provenaient d'un hôtel particulier bordelais.
A son retour à Bordeaux, le visiteur se mit en demeure d'écrire aussitôt à M. James Parker Conservateur du Département des Arts décoratifs au « Met », sollicitant des informations plus précises sur la mystérieuse « Bordeaux room ». Ce dernier, avec beaucoup de courtoisie, lui fit parvenir en retour un petit dossier sur le fameux salon. Il s'agissait d'un leg fait au Musée, en 1943, par une riche bienfaitrice, Mrs Herbert Strauss. Cette dernière avait acheté les boiseries en France en 1931 à un antiquaire de Neuilly, pour les faire installer dans une résidence qu'elle se proposait de faire construire à New-York. Mais entre-temps, les plans de la milliardaire américaine ayant changé, les boiseries ne s'adaptèrent plus à la nouvelle disposition des lieux.
![]() ©Jean-Luc Pettes Association Amis du Patrimoine Hôtel de Saint-Marc | Aussi la propriétaire décida-telle de s'en défaire et en fit don au
musée qui les installa en 1953-54 à leur emplacement actuel. Si cette
partie de l'Histoire était désormais claire et bien documentée, le Musée
ne disposait, par contre, d'aucune information sur la provenance
initiale du décor acquis par l'antiquaire parisien. Un seul indice
garantissait avec certitude l'origine bordelaise des boiseries. Il
s'agissait d'une gravure les représentant avec la mention « salon d'un
Hôtel cours d'Albret à Bordeaux », illustration figurant dans un ouvrage
publié à Paris en 1880 par César Dallys et intitulé « Décorations
intérieures empruntées à des édifices français ». L'énigme reste donc entière. Les boiseries exposées Outre-Atlantique, les auteurs de ces lignes les ayant encore récemment admirées, proviennent-elles vraiment du salon ovale de l'Hôtel de Saint-Marc ou se trouvaient-elles dans un autre hôtel particulier du cours d'Albret ? |
A moins qu'il n'y ait eu autrefois sur le cours d'Albret un autre Hôtel aujourd'hui disparu où aurait été le salon mystérieux ? Alors ? Quel historien saura un jour découvrir, caché au milieu d'une liasse d'archives, le secret du plus beau fleuron du patrimoine historique de notre CHU?
Article paru dans Passerelles, journal d'information interne du CHU de Bordeaux. Mai 2006.
Auteurs:
Jean-Luc Pettes, secrétaire général et
Dr Jean-François Tessier, président de l'association des Amis du Patrimoine du CHU