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Désir d'enfant et sclérose en plaques

  
  L'accompagnement du désir d'enfant est un sujet central dans la prise en charge de la SEP, affection qui concerne très fréquemment des jeunes femmes, du fait de la modification de l'activité inflammatoire de la maladie pendant et après la grossesse, mais également du fait de l'utilisation de plus en plus précoce de traitements immuno-actifs et potentiellement tératogènes.

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La sclérose en plaques est-elle transmissible ?

   La crainte de la transmission aux enfants est une question récurrente.

   La SEP est une pathologie multifactorielle.

  On connaît en effet l'influence de l'environnement sur le risque de développer la maladie et/ou de faire des poussées supplémentaires : gradient de prévalence Nord/Sud dans l'hémisphère nord et rôle de la vitamine D, rôles de la primoinfection symptomatique à l'EBV, de l'obésité notamment dans l'enfance, du tabagisme qu'il soit actif ou passif.

  Par ailleurs, il existe une prédisposition héréditaire, comme en témoigne l'existence de 10 à 15% de formes familiales.

  Le risque relatif de développer une SEP est plus élevé chez les apparentés de patients SEP (1-5% chez les parents au 1er degré, jusqu'à 30% chez les jumeaux monozygotes, pour une prévalence de 1/1000 en population générale). A ce jour, 233 polymorphismes mononucléotidiques (SNPs) de susceptibilité génétique à la sclérose en plaques ont été identifiés.

C'est donc l'accumulation de facteurs de prédisposition génétique et de facteurs environnementaux qui va être à l'origine du développement de la maladie.

Le dépistage systématique n'est pas recommandé chez les apparentés.

La grossesse a-t-elle un impact sur la SEP ?

Dans une large étude prospective, Vukusic et al. ont suivi 227 grossesses jusqu'à 2 ans de post-partum. On observe durant la grossesse, notamment les 2ème et 3ème
trimestres, une diminution du taux annualisé de poussées, avec un rebond inflammatoire en post-partum. Les facteurs de risque de poussées du post-partum identifiés sont le taux annualisé de poussées et la prise d'un traitement de fond avant la grossesse.

Taux annualisé de poussées autour de la grossesse, selon Vukusic et al. 2004 Brain :

vukusic et al. 2004 Brain SEP et grossesse

   Il apparaît donc primordial de planifier la grossesse lorsque la maladie est bien contrôlée et d'aborder le sujet de la parentalité à chaque consultation. La SFSEP
(Société Francophone de la Sclérose En Plaques) recommande une période de contrôle optimal de l'activité inflammatoire depuis au moins 12 mois (absence de poussée clinique, absence d'activité radiologique).

Par ailleurs, dans une large cohorte prospective, Zuluaga et al. ont suivi 501 patientes ayant présenté un premier événement inflammatoire : 28% d'entre elles ont eu au moins une grossesse et 17% ont allaité. Les analyses multivariées n'ont pas montré d'impact de la grossesse ou de l'allaitement sur le pronostic neurologique à long terme.

La SEP a-t-elle un impact sur la fertilité et l'issue de la grossesse ?

  Le nombre moyen d'enfants chez les femmes atteintes de sclérose en plaques semble plus bas que dans la population générale. Pourtant il n'est pas rapporté dans la littérature de diminution du délai de conception chez les patientes atteintes de SEP. Dans une étude rétrospective récente, 38% des patientes interrogées ont rapporté une modification de leur désir de grossesse suite au diagnostic de la SEP. Une étude de la réserve ovarienne par dosage de l'AMH et mesure du compte folliculaire chez les patientes atteintes de SEP est actuellement en cours au CHU de Bordeaux.

Quelles sont les recommandations concernant la gestion de la grossesse ?


  Comme déjà mentionné, il est recommandé de discuter régulièrement du projet de grossesse et de planifier la conception après 12 mois de bon contrôle de l'activité
inflammatoire
, à la fois pour limiter le risque de rebond de la maladie mais également le risque d'exposition fœtale à un traitement potentiellement pourvoyeur d'infection materno-fœtale ou de malformation.

 En cas de recours à une procréation médicalement assistée (PMA) :

  Plusieurs études retrouvent une augmentation du taux annualisé de poussées dans les 3 mois suivant une procédure de PMA. Cependant les études les plus récentes ne retrouvent pas ce risque de rebond, reflétant possiblement une évolution des pratiques avec une diminution de l'inertie thérapeutique chez les patientes SEP en âge de procréer.
  Une récente étude rétrospective sur les données du Système National des Données de Santé français n'a pas retrouvé d'augmentation du risque de poussée après une fécondation in vitro (225 patientes et 338 cycles de FIV ont été analysés), quelle que soit la procédure de stimulation (agoniste ou antagoniste de la GnRH).

  La SFSEP recommande une période d'inactivité inflammatoire de 12 mois au moins avant la procédure de procréation médicalement assistée. Il est recommandé de poursuivre le traitement immunoactif pendant toute la procédure de PMA et le premier trimestre s'il est compatible avec la grossesse.

Suivi de la grossesse :

  La mise à jour du calendrier vaccinal est recommandée selon les mêmes recommandations que pour la population générale. Attention, les vaccins vivants sont cependant contre-indiqués sous traitement immunosuppresseur et pendant la grossesse.
  Indépendamment du traitement de fond, le suivi de grossesse recommandé est identique à la population générale.
  Les mêmes indications d'analgésie, de déclenchement programmé, de césarienne et de rééducation périnéale sont à appliquer chez les patientes SEP que dans la population générale. Notamment, il n'y a pas de contre-indication à la réalisation d'une analgésie péridurale.
  Il est recommandé de ne pas administrer de traitement préventif de la survenue de poussée par corticostéroides, immunoglobulines polyvalentes ou plasmaphérèses en post partum, mais de prévoir une reprise précoce du traitement immunoactif si celui-ci a été arrêté.

Allaitement :

  L'allaitement n'est pas associé à une modification du risque de poussée en post-partum, bien que des études suggèrent un rôle protecteur de l'allaitement exclusif dans les 6 premiers mois. Indépendamment du traitement de fond, l'allaitement n'est pas déconseillé chez les patientes atteintes de SEP.
  L'allaitement et la reprise du traitement de fond immunoactif doivent cependant être discutés en amont avec le neurologue selon l'activité de la maladie et le choix de la patiente.

Suivi neurologique au cours de la grossesse :

  Il n'est pas recommandé de réaliser une IRM à titre systématique dans la grossesse, mais si la situation le justifie, une IRM voire une injection de gadolinium peuvent être
réalisées durant la grossesse.
  En cas de poussée, une corticothérapie systémique de courte durée, voire des plasmaphérèses en cas de sévérité, sont possibles, quel que soit le terme. L'allaitement est possible 4 heures après une prise de corticostéroïdes. 

Gestion du traitement de fond :

  La gestion du traitement immuno-actif durant la conception, la grossesse et l'allaitement doit être discutée entre la patiente et son neurologue. La stratégie sera individualisée selon les données d'activité de la maladie (nombre de poussées, activité radiologique avant la grossesse), le type de traitement en place, et bien-sûr le
souhait et les projets de vie de la patiente.

  L'observatoire français de la sclérose en plaques (OFSEP) tient le registre RESPONSE, registre prospectif de suivi des grossesses chez les patientes suivies pour une SEP, quel que soit leur traitement de fond, et de leurs enfants jusqu'à leurs 6 ans. Il apparaît primordial d'y déclarer les grossesses de nos patientes pour obtenir des données robustes sur la gestion du traitement autour de la grossesse.

Recommandations pour les traitements de fond de la SEP :


  Parmi les traitements dits « plateforme », ou de moyenne efficacité, les traitements immunomodulateurs administrés par voie injectable sous cutanée ou intra-musculaire (les Interférons et l'Acétate de Glatiramère) sont compatibles avec la grossesse et l'allaitement.

  Le Tériflunomide, administré par voie orale, est tératogène chez l'animal et a une demi-vie longue de 19 jours. Il est contre-indiqué durant la grossesse et l'allaitement. La poursuite d'une contraception efficace est nécessaire durant toute la durée du traitement et jusqu'à la réalisation d'une procédure d'élimination accélérée par Colestyramine ou Charbon activé suivie de 2 dosages plasmatiques < 0.02mg/l.

  Les Fumarates, administrés par voie orale, peuvent être poursuivis jusqu'au diagnostic de la grossesse. Le registre prospectif TecGistry ne rapporte pas d'augmentation du risque de fausse-couche ou de malformation après une durée moyenne d'exposition au Diméthyl Fumarate de 5 semaines de 379 grossesses. L'allaitement n'est pas recommandé.

  Les Anti-sphingosine 1 phosphate, administrés par voie orale, sont contre-indiqués pendant la grossesse et l'allaitement, du fait d'un risque de malformation congénitale notamment cardiaque et d'un risque d'infection. La contraception doit être maintenue 2 mois après l'arrêt du Fingolimod, 1 semaine après l'arrêt du Ponesimod.
Du fait de leur mécanisme d'action immunosuppresseur par redistribution (séquestration lymphocytaire dans les ganglions),
il existe un risque majeur de rebond inflammatoire à l'arrêt du traitement. Il est recommandé de réaliser un relais avec un autre traitement compatible avec la grossesse.

  Le Natalizumab, administré de façon mensuelle par voie intra-veineuse ou sous-cutanée, est un anticorps monoclonal anti-intégrine. S'agissant également d'un
immunosuppresseur par redistribution, puisqu'il empêche le passage lymphocytaire de la barrière hémato-encéphalique, le
risque de rebond inflammatoire est majeur à l'arrêt du traitement. De nombreuses données, notamment l'étude Babyzumab menée par l'OFSEP, confirment une diminution du risque de poussée du post-partum en poursuivant le traitement jusqu'à la 32ème semaine d'aménorrhée avec une augmentation de l'intervalle de doses à 6 semaines. Il n'y a pas de sur-risque d'interruption de grossesse ou malformation congénitale après exposition durant la grossesse, il est cependant nécessaire de dépister les anomalies hématologiques néonatales, notamment anémie et thrombopénie, notamment en cas d'exposition au
3
ème trimestre. Celles-ci sont généralement asymptomatiques (une hémorragie intracérébrale infraclinique publiée) et régressive spontanément en quelques semaines.

  L'Ocrélizumab, anticorps monoclonal anti-CD20 administré par voie veineuse de façon semestrielle, n'est pas recommandé pendant la grossesse. Il s'agit d'une IgG1 qui ne passe la barrière placentaire qu'à partir du 2e trimestre de grossesse. Sa demi-vie étant de 26 jours, son élimination est complète en 19 semaines (4,5 mois) environ. Il est donc recommandé de poursuivre une contraception efficace pendant 2 mois après la dernière cure. Un espacement des perfusions avec reprise en post-partum est recommandé. L'allaitement est possible.

  L'Ofatumumab, anticorps monoclonal anti-CD20 administré par voie sous-cutanée mensuelle, n'est pas recommandé pendant la grossesse. S'agissant également d'une IgG1 ne passant pas la barrière placentaire au premier trimestre et sa demi-vie étant plus courte, par analogie aux recommandations précédentes, le traitement peut être poursuivi puis arrêté jusqu'au diagnostic de la grossesse. L'allaitement est possible. 

  La Cladribine, est un immunosuppresseur de reconstitution immunitaire, administré de façon séquentielle par voie orale (2 cycles de 2 semaines à 1 an d'intervalle). Il est contre-indiqué pendant la grossesse et l'allaitement. La contraception doit être poursuivie 6 mois après la dernière prise. Chez l'homme également, du fait d'un possible effet sur la gamétogénèse.


Webinaire France Sclérose en plaques "Grossesse, allaitement, maternité et SEP" avril 2023:




Brochure NOVARTIS "SEP et grossesse" 2022 :

sep et grossesse novartis 2022

Brochure MERCK "Désir d'enfant et SEP" 2019 :

désir d'enfant et sep merck 2019


Article du Dr P. BUISSONNIERE, à retrouver dans la revue d'informations médicales et professionnelles "Les dossiers de l'obstétrique",
Gestion de la grossesse chez la patiente atteinte de sclérose en plaques
n° 547 de janvier 2025, ISSN 0767-8193 / e-ISSN 2726-8101 

Mis à jour le 03/03/2025